Déréférencement de Shein, Temu et AliExpress : le commerce français monte au front

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Face à la montée en puissance des géants asiatiques de l’ultra fast fashion et de l’e-commerce, les représentants du commerce français appellent à des mesures radicales. Dans une lettre ouverte adressée au gouvernement, ils demandent la suppression de ces plateformes des moteurs de recherche, dénonçant une situation devenue intenable pour les entreprises locales. Pollution, non-conformité des produits, contournement des règles fiscales : les griefs s’accumulent. L’offensive des acteurs français s’inscrit dans un contexte de durcissement législatif en Europe et en France. Analyse d’un bras de fer aux enjeux économiques, sanitaires et environnementaux.

Les géants de l’ultra fast fashion dans le viseur

Le Conseil du Commerce de France (CDCF) et la Confédération des Commerces de France (CCF), soutenus par plus de 230 enseignes, exigent le retrait de Shein, Temu et AliExpress des plateformes de recherche en ligne. Ils pointent un modèle économique qui repose sur des produits vendus à bas prix, souvent de qualité douteuse, incitant à une consommation excessive.

Cette demande intervient alors qu’une proposition de loi visant à encadrer la fast fashion a été discutée au Sénat. Ce texte prévoit notamment des restrictions publicitaires, des sanctions financières et une meilleure information des consommateurs sur l’impact écologique des vêtements vendus.

Des produits souvent non conformes aux normes européennes

Les données issues d’enquêtes européennes sont préoccupantes : entre 85 et 95 % des articles commercialisés sur ces plateformes ne respecteraient pas la réglementation européenne. Plus grave encore, une part importante des produits destinés aux enfants est jugée dangereuse.

Les représentants du commerce rappellent que le Code de la consommation autorise déjà l’État, via la DGCCRF, à exiger le déréférencement d’un site en cas de manquements graves et répétés. Ils considèrent donc que les autorités disposent déjà des moyens nécessaires pour agir rapidement, sans attendre la validation définitive de la nouvelle législation.

On se souvient de l’épisode du dé-référencement de Wish fin 2021, qui a réintégré les Stores (App Store et Google Play Store) en mars 2023.

L'application mobile d'AliExpress

Un appel large et structuré des acteurs du secteur

Parmi les signataires figurent des enseignes bien connues telles que King Jouet, JouéClub et La Grande Récré. Ces groupes expriment une inquiétude particulière quant à la sécurité des produits destinés aux enfants. Pour eux, la situation actuelle crée une distorsion de concurrence insupportable pour les distributeurs respectant les règles du marché européen.

Les fédérations évoquent une asymétrie flagrante : un commerçant français, avec un taux équivalent de produits non conformes, serait immédiatement contraint à la fermeture. Elles jugent donc l’inaction actuelle incohérente face à des plateformes qui bénéficient d’un statut de quasi-impunité.

Les réponses des plateformes face aux accusations

Shein, mis en cause, affirme avoir alloué cette année 13 millions d’euros à la sécurité et à la conformité de ses produits, avec notamment 2,5 millions de tests réalisés, en partenariat avec 15 laboratoires reconnus. Le groupe défend ses efforts, arguant d’une hausse de 25 % des tests par rapport à l’an dernier.

Malgré ces annonces, les professionnels de l’habillement en France, à l’instar de représentants du prêt-à-porter féminin, réclament une interdiction pure et simple ou, à défaut, des mesures douanières similaires à celles adoptées aux États-Unis, où des droits de douane de 120 % ont récemment été imposés, ramenés depuis à 54 %.

Une menace bien au-delà de la sécurité des produits

Pour les représentants du commerce français, les enjeux dépassent le seul volet sanitaire. Ces plateformes sont accusées d’éluder la TVA, d’éviter les droits de douane, de contourner les périodes de soldes et d’ignorer les obligations d’étiquetage et de transparence. Ce fonctionnement nuit à l’ensemble du tissu commercial national et européen.

La Commission européenne s’est aussi saisie du dossier. Elle propose désormais d’instaurer un frais fixe de 2 € sur chaque petit colis importé, dans le but de freiner l’afflux massif de produits bon marché en provenance de Chine. Une mesure censée rétablir un certain équilibre concurrentiel.

Des volumes de colis asiatiques en forte hausse

En France, 22 % des colis traités par La Poste proviennent aujourd’hui de ces grandes plateformes asiatiques, contre moins de 5 % cinq ans plus tôt. À l’échelle européenne, l’année 2024 a vu transiter 4,6 milliards de colis de faible valeur, majoritairement chinois, soit un doublement par rapport à 2023.

Cette explosion des volumes souligne l’urgence d’une réponse politique cohérente, afin de mieux réguler un commerce mondial désormais en décalage avec les exigences environnementales, sociales et fiscales européennes.

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